Jean-René Van der Plaetsen, Le Figaro Magazine
Le comédien publie son premier roman. Cela n’étonnera guère : il y est question d’une histoire d’amour qui se déroule pendant les Trente Glorieuses.
Rendez-vous avait été pris aux Marches, l’un des derniers restaurants de routiers de Paris. Une adresse et une esthétique qui lui ressemblent – oeufs mayonnaise, fromage de tête et chou farci, menus d’antan punaisés aux murs telles des pièces de musée. Bref, une certaine France, entre gibolin et crus classés, où l’aristo côtoie dans la bonne humeur l’ancien fort des halles, une France pleine de charme et de mélancolie, dont il parle avec autant de tendresse que lorsqu’il évoque un peu plus tard Montand, Reggiani et Piccoli.Depuis les Deschiens, qui l’ont fait connaître des retraités, ceux qui vivent dans les campagnes et les périphéries des villes, mais aussi de ces bobos que l’on trouve au centre des agglomérations urbaines, François Morel est devenu une star – il préférerait quel’on dise une vedette, avec ce vocabulaire d’autrefois qui n’appartient plus qu’à lui et exprime un mélange de naïveté et de nostalgie. Pourtant, il continue de vivre comme un personnage de Jules Renard ou de Marcel Aymé. C’est que François Morel a appris à se protéger de la célébrité.Son nouveau livre raconte une histoire simple, aussi vieille que le monde. Un jeune garçon, timide et rêveur, qui pourrait être un cousin du petit Nicolas, donc plus proche de l’enfance que de l’âge adulte, y est amoureux d’une certaine Isabelle Samain. D’où vient cette nostalgie du pays de l’enfance que cultive Morel? « A l’adolescence, dit-il, on peut bien ou mal tourner. Je raconte une histoire qui tourne bien. » Les féministes traqueront en vain une parole déplacée dans cette histoire de jeunes qui commencent à être travaillés par le désir : Morel est d’une génération où l’on ne se permet pas de blagues salaces devant les femmes. Son roman est une fable proche de la parabole : à travers le personnage d’Isabelle Samain, il décrit un monde qui ressemble à un âge d’or. Sans violence, sans harcèlement, sans mains qui se baladent sans autorisation. La France d’autrefois, en somme.