Boxeur-Canard enchaine

Le Canard enchaîné • Emilien Bernard

Le « noble art » ne l’est pas toujours, même quand on se bat avec fougue et panache. C’est ce que découvre le jeune Shane Rory, âme tendre au parcours heurté. Vagabond du rail et surdoué du ring dans une Amérique du début du XXe siècle accro au pugilat, il ne tarde pas à se prendre de plein fouet l’envers du décor, où grouille les combines mafieuses – du fer dans les gants à la visite de gouapes conseillant, pistolet au poing, d’aller rapidement au tapis. Une déconvenue qui force le naïf colosse à ouvrir les yeux mais ne l’empêche nullement de persévérer, tant il a ça dans le sang : « Je suis né avec les poings serrés. Ils ont eu besoin d’un levier pour les ouvrir. »

Du rail au ring. La trajectoire de Shane Rory reproduit en partie celle de Jim Tully, l’auteur de ce texte publié en 1936 et jusqu’ici inédit en français. À l’image de Jack London, qu’il voyait comme un piètre commentateur de la geste pugiliste, Tully a connu de longues années de débine, qui animeront son œuvre future. Abonné à l’orphelinat, adolescent vagabond, garçon de ferme, il opte en dernier ressort pour la boxe qu’il pratique quelques années en professionnel. C’est finalement par l’écriture qu’il se réalise et rencontre la célébrité. Doté d’une plume sèche et nerveuse, l’aspirant écrivain n’oubliera jamais d’où il vient : les bas-fonds.

Et c’est cette dimension qui fait du Boxeur un roman poignant, célébrant ces gladiateurs des temps modernes, qui finissent tôt ou tard par encaisser le coup de trop. C’est cette peur d’« être sonné définitivement » et de survivre en légume qui poussa Tully à prendre ses distances avec le ring. Shane Rory saura-t-il jeter l’éponge à temps ?

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